Les droits d’auteur en balance avec les intérêts de la société
Le créateur d’une œuvre conserve ses droits d’auteur, et ce malgré la vente de l’objet. Le législateur a néanmoins tempéré ce principe par une série d’exceptions qui contrebalancent ses droits. Explications
De nombreux litiges dans le secteur culturel découlent de la confusion entre la propriété d’une œuvre (une toile, un tirage photographique, un livre, un fichier mp3) et le droit d’exploiter cette même œuvre. Pourtant, le principe veut que les droits d’auteur demeurent dans le patrimoine de l’artiste malgré la vente du support.
Mise en balance des droits de l’artiste avec ceux de la société © Shutterstock |
Par exemple, un artiste conserve la possibilité d’autoriser la reproduction de son œuvre (dans un livre, sur un poster, une carte postale,…), alors qu’il a déjà vendu la toile originale. De son côté, l’acquéreur de l’œuvre dispose du droit de l’exposer (par essence, il peut accrocher l’œuvre selon ses désidératas), mais ne dispose pas du droit de la reproduire.
Afin de tempérer les droits de l’artiste, qui demeurent évidemment très importants, le législateur a prévu de nombreuses exceptions qui vont permettre à des tiers de mettre en œuvre une série d’actions sans pour autant devoir demander l’autorisation ou payer des droits au créateur.
En voici quelques exemples sélectionnés…
Le compte-rendu et les ventes publiques
Dans le cadre d’un compte-rendu d’actualité, l’auteur ne peut interdire la reproduction et la communication au public, dans un but d’information, de courts fragments d’œuvres ou d’œuvres plastiques dans leur intégralité, pour autant qu’ils soient justifiés par le but d’information poursuivi, et que la source, y compris le nom de l’auteur, soit mentionnée, à moins que cela ne s’avère impossible.
Cette exception s’adresse évidemment à la presse.
Dans le même ordre d’idée, il ne peut interdire la reproduction et la communication au public visant à annoncer des expositions publiques ou des ventes d’œuvres artistiques, dans la mesure nécessaire pour promouvoir l’événement en question, à l’exclusion de toute autre utilisation commerciale.
L’utilisation privée
L’auteur ne peut interdire l’exécution gratuite et privée effectuée dans le cercle de famille ou dans le cadre d’activités scolaires.
De même, il ne peut interdire les reproductions des œuvres sonores et audiovisuelles effectuées dans le cercle de famille et réservées à celui-ci.
L’enseignement
L’auteur ne peut interdire la reproduction fragmentaire ou intégrale d’articles ou d’œuvres plastiques ou celle de courts fragments d’autres œuvres fixées sur un support graphique ou analogue lorsque cette reproduction est effectuée à des fins d’illustration de l’enseignement ou de recherche scientifique dans la mesure justifiée par le but non lucratif poursuivi et ne porte pas préjudice à l’exploitation normale de l’œuvre.
Les parodies
L’auteur est également régulièrement confronté aux caricatures, parodies ou pastiches en tant qu’exception à ses droits compte tenu des usages honnêtes.
Les examens publics
L’exécution gratuite d’une œuvre au cours d’un examen public, lorsque le but de l’exécution n’est pas l’œuvre elle-même, mais l’évaluation de l’exécutant ou des exécutants de l’œuvre en vue de leur décerner un certificat de qualification, un diplôme ou un titre dans le cadre d’un type d’enseignement reconnu.
De manière caricaturale, imaginons un étudiant évalué sur sa maîtrise du piano jouant lors de son examen un œuvre de Ludovico Einaudi ou Yann Tiersen.
Le panorama
En 2016, le législateur a rajouté une nouvelle exception, connue sous le terme « exception de panorama ».
Sur cette base, l’auteur ne peut interdire la reproduction et la communication au public d’œuvres d’art plastique, graphique ou architectural destinées à être placées de façon permanente dans des lieux publics, pour autant qu’il s’agisse de la reproduction ou de la communication de l’œuvre telle qu’elle s’y trouve et que cette reproduction ou communication ne porte pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ni ne cause un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l’auteur.
Prévues dans différents domaines, les exceptions aux droits de l’auteur permettent de prendre en compte l’intérêt de la société de manière raisonnée.