Vente et défaut d’authenticité : quand le risque est supporté par l’acheteur.
Traditionnellement, les derniers mois de l’année scolaire sont fastes sur le marché de l’art contemporain. De nombreuses maisons tiennent d’importantes ventes et les résultats de cette année ne sont pas en reste: un total de 788 millions est annoncé par les maisons Christie’s et Sotheby’s sur ce segment du marché durant le mois de mai.
Précédemment, durant le mois d’avril et dans une catégorie tout à fait différente, une relique du Roi Louis XVI a été adjugée à 19.000 EUR contre une estimation haute de 6.000 EUR. Il s’agissait d’un morceau d’étoffe qui aurait été trempé dans le sang du défunt roi juste après son exécution. Une feuille de papier y était jointe, celle-ci indiquant « Sang précieux de Louis XVI, 21 janvier 1793. Donné par le colonel Joubert en 1829 ».
En règle, l’achat de tout œuvre d’art implique une prise de risque : destruction, vol, mais aussi et surtout un risque lié à l’authenticité. Suivant le marché de l’art sur lequel l’acheteur évolue, les écueils liés à ce point sont plus ou moins nombreux.
Si dans le cas de l’art contemporain, le risque d’acquérir un faux est limité dans la mesure où il est encore possible de retracer l’origine précise de l’œuvre, dans le cas d’une relique deux fois centenaires (et plus généralement pour toute œuvre ou antiquité), l’acheteur prend un risque plus important. Or dans le cas de la relique, comment s’assurer de l’authenticité d’un tel objet? Le sang qui tache l’étoffe pourrait provenir de n’importe qui. Et il ne peut raisonnablement être attaché au papier annoté la valeur qu’aurait un certificat d’authenticité. Alors qui supporte ce risque ?
En droit de l’art, l’élément clé à prendre en considération est l’information telle qu’elle est fournie à l’acheteur.
Le vendeur cède-t-il l’œuvre (ou l’antiquité) comme une véritable réalisation de tel artiste ? De tel atelier ? De tel courant ? De telle période ? En fonction des déclarations du vendeur, l’acheteur doit pouvoir évaluer le risque lié à l’authenticité. Au final, si cette qualité faisait défaut, il y aurait un vice du consentement de l’acheteur, et justifierait l’annulation de la vente. Dans ce cas, c’est bien le vendeur qui supporte le risque lié à l’authenticité.
A l’inverse, si l’acheteur potentiel a été pleinement informé du risque encouru, il n’y aurait plus moyen d’annuler la vente sur cette base: le consentement a été donné en connaissance de cause.
Tout est une question de faits qui doivent être analysés dans chaque situation. On mesure au passage l’importance de conserver tous les documents liés à la vente d’un bien à haute valeur historique, culturelle, artistique et financière. Dans le cas de la relique de Louis XVI, un expert expliquait que seule une analyse ADN était susceptible de confirmer avec certitude la qualité attachée à l’étoffe. L’acheteur le savait lors de l’achat. Le risque est donc bien supporté par ce dernier à la décharge du vendeur.