Le Street Art : enfin légal ?
Le street art met potentiellement en œuvre quatre types de règles juridiques. Cette forme d’art est-elle légale ? Explication.
De nouvelles fresques ont été découvertes à Bruxelles et suscitent encore une fois le débat, alors que l’on lit toute sortes d’avis sur le sujet… En définitive, que penser de cette for
me d’art d’un point de vue (strictement) juridique ?
De manière générale, il existe quatre approches potentielles de ce sujet d’un point de vue légal. Certaines règles sont en faveur de l’artiste, d’autres sont favorables au propriétaire de l’immeuble et enfin il existe des règles qui protègent la collectivité. La légalité de la démarche artistique dépend donc du respect cumulatif de chacun de ces éléments.
L’artiste
En matière de street art, comme dans n’importe quelle discipline artistique, l’artiste voit son œuvre protégée dès qu’une double condition est remplie :
– L’œuvre doit être le reflet de son esprit créateur (on parle d’originalité) ;
– L’œuvre doit être mise en forme (perceptible par les sens).
Dans ce cas, l’artiste a la possibilité de s’opposer à la destruction ou la détérioration de son œuvre. Il s’agit là d’une mise en œuvre de son droit moral qui lui permet de préserver l’intégrité de ses créations.
Le problème – en matière de street art – découle du fait que la fresque est parfois réalisée sans l’accord du propriétaire, qui pourrait demander qu’elle soit purement et simplement détruite, et ce malgré les droits d’auteur.
Le propriétaire
Le support d’une fresque est souvent un immeuble (les récents exemples à Bruxelles sont tous réalisés sur des façades). Le droit le plus absolu d’un propriétaire est de détruire ce qui lui appartient ou de le modifier selon ses désirs. En ce qui concerne une œuvre de street art, s’il ne l’a pas commandée à l’artiste, le propriétaire reste libre de la retirer… Ou de la faire retirer (aux frais de l’artiste) !
A l’inverse, si elle a été réalisée avec son accord, l’œuvre s’impose à lui, de même que les droits d’auteur qui y sont liés. Dans cette seconde hypothèse, il ne faut jamais perdre de vue que la propriété physique d’une œuvre d’art (que ce soit une toile ou – dans le cas présent – une fresque) n’emporte pas une cession des droits de l’artiste, qui doivent donc être respectés.
Les communes
En la matière, la tendance actuelle semble être une relative tolérance de la part des communes. Bien souvent, elles encouragent le street art en mettant à la disposition des artistes des espaces où leurs œuvres peuvent être développées. En ce qui concerne les récentes fresques, à notre connaissance, les déclarations dans la presse semblent s’orienter vers une pudique réserve dans l’hypothèse où des habitants se plaindraient…
Si elles souhaitent s’opposer à l’œuvre, les communes disposent pourtant d’outils puissants. Elles peuvent notamment s’en référer au droit de l’urbanisme et vérifier si l’œuvre a été placée selon les prescrits très stricts. Si ce n’est pas le cas, l’œuvre doit être retirée.
La société
Enfin, le street art intéresse la société dans sa globalité au travers de la possible infraction pénale qui peut y être liée. Le code pénal prévoit que sera puni d’un emprisonnement d’un mois à six mois et d’une amende de vingt-six euros à deux cents euros ou d’une de ces peines seulement, quiconque réalise sans autorisation des graffitis sur des biens mobiliers ou immobiliers. .
Il en sera de même pour quiconque aura volontairement dégradé les propriétés immobilières d’autrui.
Enfin, ces peines peuvent être aggravées lorsqu’un des mobiles de la démarche est motivée par exemple par la haine, le mépris ou l’hostilité à l’égard d’une personne en raison de sa prétendue race, de son origine nationale ou ethnique, de sa nationalité, de son sexe, de son orientation sexuelle, de sa conviction religieuse ou philosophique, d’un handicap, de sa langue, de sa conviction politique, etc…
On le voit, la loi pénale, qui représente – par son application – les intérêts de la société, scrute les démarches qui sont effectuées par les artistes, mais surtout celles qui ne visent qu’à dégrader les biens d’autrui.
En conclusion, le street art est-il légal ? La réponse, positive ou négative, varie en fonction de la démarche concrète réalisée par l’auteur… A déterminer au cas par cas.